vendredi 10 octobre 2014

L'Etrange Festival 2014

L'Etrange Festival 2014

La vingtième édition de L'Etrange Festival s'est déroulée du 4 au 14 septembre 2014 au Forum des Images à Paris. Comme chaque année, ce festival aussi étrange que convivial a su faire profiter les spectateurs d'une large sélection de films et de rencontres.
Retrouvez mon compte-rendu de l'édition précédente en cliquant ICI.

Voici le palmarès de cette vingtième édition :
- Prix Nouveau Genre : The Voices de Marjane Satrapi
- Prix du Public : The Voices de Marjane Satrapi
- Grand Prix Canal + (compétition court métrage) : Pony Place de Joost Reijmers
- Prix du Public (compétition court métrage) : Sequence de Carles Torrens

The Voices, le dernier film de Marjane Satrapi (Persepolis, Poulet aux prunes) à été le premier film projeté du festival, et en a fait l'ouverture. La salle, pleine à craquer, a semblée unanime sur la surprise qu'a été le film, quoiqu'un peu trop convenu. Lisez plutôt ma critique en cliquant ICI.

Le chien était à l'honneur. En plus de celui qui parle de The Voices, l'espèce canine était au centre du film White God de Kornél Mundruczo, une belle déception venue d'Hongrie pourtant tant attendue. Pour en savoir plus, lisez ma critique du film en cliquant ICI.

Ryan Reynolds dans The Voices de Marjane Satrapi
Le festival a cumulé bien d'autres déceptions. Ainsi The Canal, un thriller irlandais signé Ivan Kavanagh, avait tout pour plaire, surtout dans sa première demie-heure, avec un supens à couper au couteau et une photographie esthétique et colorée. La suite n'est qu'une laborieuse histoire de paranormal, faisant de The Canal un Conjuring indé et plus chiadé. Une belle déception tant on en attendait d'un film de genre venu d'Irlande. Le concept des films séduit (scénario, casting, origine, esthétique, design de la promotion...) et le contenu déçoit. C'est notamment le cas pour Cub, du belge Jonas Govaerts, une histoire d'enfant tueur qui tourne au ridicule, d'Alleluia d'un autre belge, Fabrice du Welz, l'auteur de Calvaire, volontairement grossier et nauséeux, avec son image granuleuse et la tendance du réalisateur à filmer ses personnages libidineux en très gros plan, sans parler de Radio Silence, film allemand grotesque réalisé par Marco Riedl et Carsten Vauth.

Rupert Evans, brillant dans The Canal, qui avait déjà fait ses preuves
dans l'excellent The Incident d'Alexandre Courtès
Néanmoins, malgré les mauvaises surprises, il y en avait aussi des bonnes. It follows de David Robert Mitchell est sans conteste l'une des plus belles surprises du festival. Certains diront, à juste titre, que le film ne fait pas preuve d'une grande originalité. Mais la force du long-métrage est à chercher du côté de la mise en scène, de l'esthétique, du son, de la musique et des acteurs. Le réalisateur fait renaître l'angoisse des années 80, on pense notamment aux Griffes de la nuit de Wes Craven en ce qui concerne l'esprit et à La nuit des masques de John Carpenter en ce qui concerne la musique. David Robert Mitchell s'en donne à coeur joie, à commencer par une scène d'ouverture dantesque. C'est avec peu de rebondissements mais une mise en scène sinueuse caractérisée par des plans fixes et panoramiques que le metteur en scène crée le suspens. It follows révèle aussi une actrice, la belle Maika Monroe, parfaite. Bonne nouvelle, on la retrouvera dans le prochain film d'Adam Wingard (You're next, V/H/S) intitulé The Guest !

Maika Monroe, brillante dans It follows de David Robert Mitchell
L'autre très belle surprise du festival est le documentaire Lost soul de David Gregory, sous-titré The doomes journey of Richard Stanley's Island of Dr. Moreau. Le documentaire relate l'histoire du film L'Île du docteur Moreau réalisé par John Frankenheimer, dont la mise en scène a été commencé par Richard Stanley, le scénariste du film, qui a été - injustement ? - écarté du projet au bout de trois jours de tournage. Lost soul rend avant tout un bel hommage à Richard Stanley, qui avait mis toute sa volonté dans ce projet pour en finir rejeté, ce qui l'a tellement abattu qu'il n'a par la suite plus jamais réalisé de film ! Aussi drôle que touchant, et jamais ennuyeux, le documentaire regroupe de nombreux témoignages sur les conditions de tournage complètement folles de ce film considéré comme l'un des pires jamais tourné, avec de nombreuses informations plus insolites les unes que les autres. Vous apprendrez entre autre que Roman Polanski devait initialement mettre en scène le film, que Val Kilmer et Marlon Brando étaient insupportables sur le plateau, que le tournage se terminait par des scènes de beuveries, que Richard Stanley, après avoir été écarté du tournage, est revenu s'infiltrer sur les lieux du tournage déguisé en bête. Bref, un documentaire sous forme de making-of à ne pas rater pour tout curieux du septième art.

Richard Stanley lors des premiers essais
pour L'Île du docteur Moreau
La perle du festival, beaucoup moins fun mais bien plus terrible, reste le film ukrainien The Tribe, qui avait été applaudit auparavant à Cannes. Ce film de Myroslav Slaboshpytskiy est entièrement dénué de paroles et de musique et met en scène des personnages sourds-muets. Un bel effet de style qui de par son absence totale de paroles met en avant le moindre son. On ne cesse de se rattacher au moindre bruit, et on comprend par le regard, non plus par les paroles. C'est un film très comtemplatif, parfois touchant, parfois très dur - plusieurs personnes ont quitté la salle.


Autre oeuvre attendue, Open Windows de l'espagnol Nacho Vigalondo, le réalisateur du très bon Time Crimes, se révèle laborieuse et largement tirée par les cheveux, entre found footage, espionnage, horreur et science-fiction. Malgré ça, le metteur en scène a au moins le mérite de proposer quelque chose de nouveau et de travaillé. On y retrouve Elijah Wood, qui semble avoir trouvé sa voie dans le cinéma de genre depuis Maniac, et la belle Sasha Grey.

Sasha Grey dans Open Windows de Nacho Vigalondo
A l'occasion de son vingtième anniversaire, le festival proposait le cycle 20 ans / 20 films, en revenant sur ce qui avait fait le charme du festival durant ses vingt dernières années. On a ainsi pu découvrir ou revoir des curiosités telles que Le Roi des Morts de l'allemand Jörg Buttgereit, l'auteur de Nekromantik, et Gummo, une fresque de freaks modernes signée Harmony Korine (Spring breakers).

Dans la carte blanche accordée à Sono Sion, j'ai pu voir le classique French Connection de William Friedkin, un chef-d'oeuvre de l'espionnage qui n'a pas vécu dans lequel on prend un réel plaisir à contempler les scènes d'actions entièrement dénuées de musique.

Quoique parfois décevante, cette vingtième édition de l'Etrange Festival aura su proposer quelques nouveaux fleurons du cinéma de genre, avec notamment It follows, auquel on souhaite un bel avenir ainsi qu'à son équipe.


L.H.

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