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Du 4 au 10 mars avait lieu au Gaumont Champs Élysées le festival international du film indien Extravagant India, avec pas moins de neuf longs-métrages en compétition, dont l'un deux était FILMISTAAN (2012), le premier film de Nitin Kakkar, réalisateur de séries d'épouvante pour la télévision indienne (Ssshhh... Phir Koi Hai).
Sharib Hashmi, l'acteur principal, est connu en Inde pour sa participation dans Slumdog Millionaire (de Danny Boyle) et pour avoir gagné un National Award (Oscar indien) pour le film de Nakkar. Le film a reçu une mention pour son scénario, à défaut du grand prix décerné à Q de Sanjeev Gupta.
Du 4 au 10 mars avait lieu au Gaumont Champs Élysées le festival international du film indien Extravagant India, avec pas moins de neuf longs-métrages en compétition, dont l'un deux était FILMISTAAN (2012), le premier film de Nitin Kakkar, réalisateur de séries d'épouvante pour la télévision indienne (Ssshhh... Phir Koi Hai).
Sharib Hashmi, l'acteur principal, est connu en Inde pour sa participation dans Slumdog Millionaire (de Danny Boyle) et pour avoir gagné un National Award (Oscar indien) pour le film de Nakkar. Le film a reçu une mention pour son scénario, à défaut du grand prix décerné à Q de Sanjeev Gupta.
Titre : Filmistaan
Titre original : Filmistaan
Réalisation : Nitin Kakkar
Scénario : Nitin Kakkar et Sharib Hashmi
Acteurs : Sharib Hashmi, Inaamulhaq, Kumud Mishra, Gopal Dutt
Sortie en salles : 6 juin 2014 (Inde, pas de sortie française prévue)
Genre : Comédie
Synopsis : Sunny, dont le rêve est de devenir un acteur de Bollywood, se fait éliminer à toutes les auditions. Accompagnant une équipe de tournage américaine dans une zone désertique, il se fait enlever par erreur par un groupe de terroristes. La maison où il est retenu appartient à un pakistanais fou de DVD de films de Bollywood piratés.
Ma critique : FILMISTAAN a tout d'une comédie réussie. Nitin Kakkar part d'une idée simple, un quiproquo qui permettra d'installer l'histoire : des terroristes pakistanais enlèvent par inadvertance un acteur indien, au lieu du réalisateur américain avec qui il collaborait. Du fait de son origine, l'otage sera tout de même enfermé pour tenter d'obtenir une rançon, en vain. Cette idée, très simple, va permettre à Kakkar d'y intégrer divers éléments de la comédie classique, comme le thème de l'otage qui se révèle insupportable pour ses ravisseurs, mais surtout d'explorer d'autres horizons. Kakkar ne fait pas de son film une simple comédie, qui tiendrait surtout à la prestation surexcitée de Sharib Hashmi. Il réalise un film plus profond qu'il n'y paraît, et qui va à contre-sens de certains films bollywoodiens chantants. Il rend tout d'abord un bel hommage à la culture de son pays, avec de nombreuses références au cinéma bollywoodien - difficiles à cerner pour les néophytes mais sûrement amusantes pour les inconditionnels - à travers les imitations du personnage principal, qui connaît les répliques par coeur. Car Sunny est avant tout un amoureux du cinéma indien depuis son enfance.
Une magie du cinéma que ne perçoivent pas les kidnappeurs, deux extrémistes religieux pakistanais. C'est à partir de là que Kakkar ajoute à sa recette une dimension religieuse, dimension et non discours, car il ne fait l'apologie ni de l'otage indien ni des ravisseurs pakistanais, évacuant toute interprétation manichéenne. Le personnage de Sunny réalise même, en apprenant qu'il se trouve au Pakistan, que les gens et la nourriture se ressemblent. Le méchant, c'est l'obscurantisme, peu importe son camp. FILMISTAAN évoque donc les conflits entre l'Inde et le Pakistan, et traite de la question de l'obscurantisme - une question d'ailleurs bien d'actualité aujourd'hui en France et dans le monde. Toujours dans une logique de ne pas séparer le bon du mauvais, Kakkar tisse des liens ambigus entre les personnages. L'un des deux ravisseurs, dont l'extrémisme religieux sera expliqué par l'évocation de son enfance, sortira peu à peu de l'ombre, ce que se refusera son collègue.
Autre élément judicieux du film, le personnage de Aftaab, le vendeur de DVD craqués de films indiens et occidentaux, qui les distribue aux Pakistanais et qui les diffuse dans son village. Mêmes les soldats pakistanais viennent se procurer auprès de lui des films pornographiques ! Ce personnage est là comme la preuve que les deux pays peuvent s'entendre, au moins sur le plan culturel. Il permet aussi de mettre en exergue l'obscurantisme culturel, en plus de l'obscurantisme religieux. Le film offre aussi à voir, par ce biais, les conditions de visionnage de films, dans lesquelles un écran de télévision, pour une cinquantaine de spectateurs environ, remplace l'écran de cinéma. FILMISTAAN est un film sur le cinéma et pour les amoureux du cinéma.
Le film est aussi drôle que touchant, notamment dans le traitement des personnages, par exemple lorsque Sunny fait face à la violence par l'humour, toujours dans l'optique de se donner en spectacle. Il jouera jusqu'à la mort. Un contraste assez dur mais très bien vu. Il s'agit d'un obscurantisme volontaire et inoffensif, qui s'oppose à l'obscurantisme involontaire et dangereux, l'art dramatique comme exutoire de la violence.
FILMISTAAN est un film intelligent et plein d'humanité qui répond à ses deux ambitions, faire rire et sensibiliser, un film solide par son interprétation et sa technique, chaque personnage y a sa consistance et on y admire un soin attaché à l'esthétique. La fin du film est comme un cri d'espoir pour le cinéma indien et pakistanais, pour une entente entre les deux pays, et plus généralement pour l'amour du cinéma...
De gauche à droite : Inaamulhaq, Gopal Dutt, Sharib Hashmi et Kumud Mishra... |
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