dimanche 8 février 2015

It follows

Lors de la dernière édition du Festival international du film fantastique de Gérardmer, IT FOLLOWS a reçu le Grand Prix de la critique. Ce deuxième film de David Robert Mitchell, après The Myth of the american sleepover (2010), mérite amplement cette consécration. Avons-nous là déjà le meilleur film d'horreur de l'année ? Sans aucun doute.


Titre : It follows
Titre original : It follows
Réalisation : David Robert Mitchell
Scénario : David Robert Mitchell
Acteurs : Maika Monroe, Keir Gilchrist, Daniel Zovatto, Jake Weary, Olivia Luccardi, Lili Sepe, Heather Fairbanks...
Sortie en salles : 4 février 2015
Genre : Horreur

Synopsis : Après une expérience sexuelle apparemment anodine, Jay se retrouve confrontée à d'étranges visions et l'inextricable impression que quelqu'un, ou quelque chose, la suit. Abasourdis, Jay et ses amis doivent trouver une échappatoire à la menace qui semble les rattraper...

Ma critique : Après un film qui traitait déjà le thème de l'adolescence, David Robert Mitchell revient avec un sujet qui semble lui tenir à coeur dans IT FOLLOWS. Cette fois-ci, c'est à travers le fantastique que le réalisateur américain explore les tréfonds d'une jeunesse en proie aux désirs sexuels, exposée ici à une sorte de MST, une malédiction sexuellement transmissible qui a comme effet de faire apparaître d'étranges personnes. Sous la forme de conte horrifique et parfois onirique, Robert Mitchell ressuscite le shocker des années 80, à la manière des films de Wes Craven. On pense justement aux Griffes de la nuit (1984), dans lequel un monstre nommé Freddy terrorise une bande de jeunes à travers leurs rêves. Le jeune réalisateur orne même son film de sons électroniques dignes d'un film de John Carpenter. Mais les références s'arrêtent là. IT FOLLOWS n'est pas un pot-pourri du cinéma d'horreur comme peuvent l'être certaines productions actuelles, qui ne cessent de ressasser les mêmes histoires. Même si celle du film en question peut paraître simple, elle n'est en rien simpliste dans son traitement.


En effet, alors que le sexe est en général une simple façon de symboliser la frustration sexuelle d'un psychopathe, il est ici l'objet d'une réflexion sur la peur qu'il peut provoquer, sur la peur de son corps et du corps de l'autre à l'adolescence. Et contrairement à ce que certains critiques croient, la sexualité n'est pas ici la représentation du mal en lui-même, mais une façon de le propager, telle une MST. Il ne s'agit en aucun cas d'un message moralisateur sur le sexe. Au contraire, l'union, les sentiments, les désirs sont un moyen de survivre et de faire face au mal. Alors que le film d'horreur a pour habitude de séparer ses personnages les uns des autres afin de les faire périr alors qu'ils forniquent dans un coin, comme si leur mort était une sorte de purification, avec la métaphore de l'arme blanche comme moyen de pénétrer les victimes, IT FOLLOWS s'intéresse au contraire à l'unité de ses personnages, aux sentiments amoureux, que viendrait perturber un mal extérieur. Au lieu de filmer une jeunesse débauchée, Robert Mitchell filme une jeunesse innocente et intelligente, le tout intelligemment.

It, la chose qui poursuit l'héroïne, représente les affres de la maladie, de la drogue, de la vieillesse, ainsi que l'absence de père, aux travers d'espèces d'âmes échouées, perdues entre deux mondes, sans faculté de parole, et qui tentent de fusionner avec la pureté juvénile. David Robert Mitchell matérialise les peurs qui traversent l'adolescence. Face à ces peurs, la bande de jeunes de IT FOLLOWS reste soudée, allant jusqu'à se surveiller durant leur sommeil, comme les jeunes des Griffes de la nuit. Cette bande est notamment ce qui fait la force du film. Robert Mitchell la rend parfaitement attachante, en tissant des liens entre les personnages, parfois touchant, par exemple dans la relation entre Jay et Paul, et parfois très drôle, voir le personnage de Yara.

Keir Gilchrist et Maika Monroe
La mise en scène du film est très esthétique. Comment oublier cette scène d'ouverture aussi délirante que terrifiante filmée en plan-séquence ? Le film ne joue pas avec l'effet de surprise, donc pas de jump scares à gogo, mais propose au contraire une mise en scène sinueuse, avec des plans-séquences et des zooms qui laissent approcher la menace vers le spectateur, toute entière exposée à ses yeux et à ceux de la victime, qui seule peut la voir. Et s'il n'y a pas d'effets de surprise, c'est parce que le mal est partout. Il survient à n'importe quel moment, lentement mais inévitablement. Ainsi, le spectateur est à l'affût durant tout le film, dans un véritable jeu d'observation des arrière-plans, faisant renaître une peur que l'on n'avait pas ressentie depuis bien longtemps.

Lili Sepe et Maika Monroe
IT FOLLOWS plonge le spectateur dans le monde de Jay, un monde coupé des parents, un monde intemporel, entre les années 80-90 et aujourd'hui. L'héroïne est interprétée par la magnifique Maika Monroe (Last days of summer, The Guest), parfaite dans le rôle d'une jeune fille innocente, qui par sa voix et sa présence physique envahit l'écran, si bien qu'il est impossible de ressortir indifférent à son charme.

IT FOLLOWS est un film d'horreur, un vrai, qui fait peur, qui fait parfois rire aussi, et qui nous replonge dans l'adolescence. Mais si le film n'est pas qu'un simple tour de force horrifique, c'est parce que les personnages sont attachants, avec une véritable empathie pour le personnage de Jay, et que l'on prend un véritable plaisir à se laisser aller dans cette ambiance suave et sucrée, accompagnée d'une excellente bande-son signée Disasterpeace, aussi angoissante que lancinante. Bref, IT FOLLOWS est un véritable chef d'oeuvre, un film à graver dans l'histoire du cinéma d'horreur.


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