Titre : Killer Joe
Réalisation : William Friedkin
Acteurs : Matthew McConaughey, Emile Hirsch, Juno Temple, Thomas Haden Church, Gina Gershon...
Année de sortie : 2012
Genre : Thriller
Synopsis : Endetté auprès d'un caïd, Chris découvre que sa mère, qu'il déteste tant, possède une assurance-vie de 50 000 dollars. Il décide de la faire buter par Killer Joe, un flic qui arrondit ses fins de mois en tant que tueur à gages. Problème : ce dernier réclame une avance que Chris ne peut régler. Alors qu'il est sur le point d'annuler le contrat, Killer Joe tombe en extase devant Dottie, la jeune et innocente soeur de Chris, et la "négocie" à la place de l'avance. Chris et son dégénéré de père n'y réfléchissent pas à deux fois.
Infos utiles : Le tournage de KILLER JOE a duré un peu plus d'un mois et s'est déroulé entre novembre et décembre 2010.
Ma critique : Âgé de 77 ans, William Friedkin n'a pas perdu de son énergie et n'a pas finit d'explorer de nombreux horizons. Après avoir été séduit par les pièces de théâtre de l'auteur Tracy Letts et après avoir adapté l'une de ses pièces au grand écran avec le génial et glaçant Bug, le réalisateur de French connection et de L'Exorciste renouvelle l'expérience avec KILLER JOE, autre adaptation d'une pièce éponyme de Letts, écrite en 1991. On y retrouve une quasi unité de lieu et le style propre de l'auteur, également scénariste du film, ainsi que la mise en scène très maîtrisée de Friedkin, qui a tendance à toujours apporter une dimension fantastique dans ses long-métrages, ici à travers des scènes qui penchent subtilement dans l'irréalité. Le film s'ouvre avec une séquence remarquable, où l'on suit un personnage - d'abord inconnu - en gros plan, qui crie en courant sous la pluie, le tonnerre grondant et un chien aboyant, le tout filmé avec maestro par Friedkin, comme un film noir. Un contraste se fait lorsque l'on découvre Dottie, innocente, à l'abri de toute cette frénésie cinématographique et scénaristique. Friedkin ne cessera par la suite de bousculer et de surprendre le spectateur avec un enchaînement d'action plus ou moins violentes, puis avec une multitude de scènes remarquables tout au long du film, comme l'apparition du tueur, qui frôle volontairement le ridicule, avant de découvrir toute la noirceur de Killer Joe. Les éléments essentiels des pièces de Letts sont les prestations des acteurs, qui doivent assurer des rôles de personnages torturés et qui mènent de plus en plus vers une explosion de folie. Friedkin avait assuré le coup avec Michael Shannon (Take Shelter, Boardwalk Empire) dans Bug et de nouveau avec Matthew McConaughey (Tonnerre sous les tropiques, Magic Mike), dans le rôle de Joe, après avoir dévoilé son talent dans La défense Lincoln (De Brad Furman). Matthew McConaughey tient avec KILLER JOE le rôle de sa vie, désormais indélébile de son physique de charmeur. Terrifiant et inexpressif, il imprègne un personnage impénétrable aux "yeux qui font mal", comme le remarque si bien le personnage de Dottie, interprété par Juno Temple (The dark knight rises, Greenberg), qui parvient avec ce film à se démarquer. Mais c'est aussi Emile Hirsch (Into the wild, Speed racer) qui décroche son meilleur rôle, excellent dans le rôle d'un jeune aussi inconscient qu'antipathique, Friedkin parvenant à trouver la juste mesure pour ne pas trop s'attacher à son personnage, malgré sa situation à plaindre et son physique d'ange. Le réalisateur du Convoi de la peur parvient aussi au fil du film à manipuler le spectateur en faisant passer Killer Joe pour le personnage principal, avant Chris. Le fait que le film soit adapté d'une pièce se fait malheureusement - mais aussi inévitablement - ressentir vers le milieu du film par l'étouffement du lieu et des dialogues. Le réalisateur aère cependant son film avec des scènes d'extérieurs absolument angoissantes, voir dérangeantes pour certaines scènes d'intérieures, notamment une qui vous coupera l'envie de manger du poulet pour un bon moment. Malgré sa limite pour les moins de douze ans, le film fait preuve d'une violence particulièrement crue, qui rappelle par certains aspects celle de The killer inside me, le chef-d'oeuvre de Winterbottom, la nudité en plus. De plus, le film vous offre les "charmes" de la vie texane et de ses paysages, filmés majestueusement par Friekin, avec une dominante de bleu. Certaines scènes ne manquent pas de rappeler Massacre à la tronçonneuse (De Tobe Hooper), notamment à travers une scène de repas aussi fascinante que dérangeante, Friedkin avouant adorer ce classique de l'horreur, même si il dit ne pas y avoir penser pendant le tournage. KILLER JOE est accompagné d'une superbe musique qui ne manque pas de souligner la noirceur du film, semblant nous rappeler constamment la présence de Killer Joe, qui ère de pièces en pièces, passant la plupart de son temps dans la chambre de Dottie, tel un adolescent. Le film s'achève avec une orgie de folie, une explosion d'absurdité et de violence, totalement jubilatoire. En bref, KILLER JOE est un film, un vrai, comme il est rare et bon d'en voir, réalisé par un maître de l'horreur et du film policier qui ne cesse de s'améliorer et qui semble avoir trouvé sa voie, à l'inverse de la plupart des "grands" réalisateurs actuels qui régressent.
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Emile Hirsch (à gauche) et Matthew McConaughey (à droite) |
Voici l'affiche originale du film :